Bonsoir Jean-Claude, le forum,
Jean-Claude a écrit:Sauvegarder en RAW
Je ne partage pas cette vision quelque peu pessimiste du format RAW. Comme il ne s'agit pas du sujet de ce fil de discussion, je me permets un petit aparté ici mais je préférerai que nous continuions la discussion dans un fil dédié, si cela paraît utile. Si Christian ou un autre administrateur passe par ici, on peut peut-être scinder la discussion dès nos premiers messages ?
Le cas du focus stacking. Il s'agit bien entendu d'une technique très utilisée par ici, aussi bien en micro qu'en macro. Je pense qu'on a plus ou moins tous joué avec cette technique sur ce forum. N'oublions pas pour autant qu'il existe des tas de situations où elle ne sert pas du tout. Combien de photographes ne connaissent tout simplement pas cette technique ou, tout au moins, ne l'utilisent pour ainsi dire jamais ? Et quand bien même, il y a aujourd'hui moyen d'effectuer des
traitements par lots sur les fichiers RAW, en s'aidant d'une "recette" (= ensemble de réglages définis à la main sur un fichier RAW de la série) appliquée à la série de fichiers RAW tout entière. Cela garantit une homogénéité du traitement. La conversion vers un autre format, JPEG ou TIFF, peut aussi s'effectuer par lots. Le format TIFF garantit les images les plus fidèles aux données d'origine, mais elles sont effectivement très volumineuses. Le JPEG engendre une perte de qualité, mais elle est (presque) objectivement négligeable pour nos applications. Pour ma part, je fuis le JPEG sur mes clichés de fluorescence au confocal, car je veux quantifier mon intensité de signal, mais ailleurs... je m'en moque un peu, tout simplement parce que je suis incapable de percevoir l'effet d'une légère compression (disons une qualité fixée à 95%) qui fait pourtant passer mes clichés de 20-25 Mo (en TIFF) à 5-15 Mo (selon la composition de l'image qui rend la compression plus ou moins efficace).
Format RAW et qualité optique. Hé bien, je suis tenté de penser le contraire. À mon sens, plus les optiques sont bonnes, moins le post-traitement est indispensable. Restons chez Canon. Les images obtenues avec un objectif excellent (par exemple, le très onéreux 70-200 L f/2.8) seront probablement excellentes même enregistrées directement au format JPEG. En microscopie, nos objectifs planapo à ON élevée donnent des images très résolues avec à peu près n'importe quel capteur (même un téléphone mobile, essayé personnellement derrière un neofluar). D'ailleurs, pour peu qu'on observe attentivement ce qui se passe en périphérie de l'objectif (tout le monde sait que les objectifs, c'est comme le fromage, c'est meilleur au cœur de la meule
), on aura certainement très peu d'aberrations chromatiques, des distorsions géométriques faibles ou modérées, etc. de sorte que l'on peut sans doute envisager de diffuser ses images auprès d'un public exigeant sans trop les retravailler au préalable. Au contraire, avec des optiques plus abordables, donc de conception optique moins soignée, les aberrations chromatiques sont souvent très marquées en périphérie. De même, il faut parfois corriger les aberrations géométriques trop marquées et/ou le vignettage. Or, à ce jeu, le format RAW offre un contrôle très supérieur au format JPEG, d'autant que la compression, pour le coup, a la fâcheuse tendance d'aggraver ces problèmes. À titre personnel, j'ai définitivement perdu tout scrupule à présenter des images issues d'un EF-S 18-135 lorsque j'ai pu atténuer de façon satisfaisante les irisations disgracieuses en périphérie. Ce n'est pas facile sur du JPEG, c'est indolore en RAW.
Contre-argumentaire au paragraphe précédent. Ce sont souvent ceux qui possèdent des optiques performantes qui utilisent le plus le format RAW. Mais ce sont d'ailleurs aussi souvent ceux qui utilisent le capteur le plus performant (par exemple, les boîtiers pro ou quasi pro, style EOS 5D ou 1D) derrière ces optiques performantes. Je pense que c'est un tout : si tu as les phynances (coucou Ubu) et la passion pour accepter de débourser des sommes importantes dans des optiques pour accéder à un certain niveau de qualité, tu ne vas généralement pas t'arrêter en chemin. Au contraire, tu vas chercher à optimiser toute la chaîne de production de tes images : qualité des optiques (photo, micro, ou macro), qualité du capteur (haute résolution, fidélité des couleurs, peu de bruit) sans oublier, selon les sujets, sa réactivité et sa robustesse, qualité du post-traitement (format RAW, logiciels dédiés). Pour autant, il me paraît clair que les optimisations effectuées en post-traitement seront moins criantes que si tu pars, à la base, d'optiques présentant des "petites faiblesses" plus prononcées.
Lire un fichier au format RAW. C'est effectivement un gros problème, car ce format n'est absolument pas ouvert. Il existe des logiciels libres capables de lire les formats RAW propriétaires (un exemple,
dcraw ou son frontend
ufraw), mais ils ne sont peut-être pas aussi excellents que les logiciels de Canon (après tests, Digital Photo Professional fait un peu mieux que
ufraw auquel manque encore les corrections de "netteté" (
sharpness)). Quoi qu'il en soit, c'est un réel problème pour la sauvegarde à long terme de nos données. En tant que linuxien, cela me pose aussi un problème. Ma solution, à l'heure actuelle, est un compromis : faire les optimisations souhaitées, sauvegarder en TIFF/JPEG, et supprimer le fichier RAW. Je perds une partie des données, mais je m'assure de pouvoir les lire tant que je voudrais. On peut rêver d'un format Raw universel et ouvert (avec le sourire de la crémière
)... mais il n'existe pas à ma connaissance.
Bref, peaufiner les réglages avant la photo c'est indispensable, car on ne peut bien évidemment pas faire apparaître des infos qui n'existent pas (zones "cramées", mauvais cadrage, flou complexe, artefacts lumineux complexes, etc.) et, pire encore, rectifier des faiblesses de nature esthétique (cadrage, profondeur de champ, qualité du bokeh, etc.), mais je ne voue pas pour autant le format RAW aux gémonies.
Cordialement,
Eddy