Bonsoir
Voilà une punaise qui m'importune à la maison depuis quelque temps. Plusieurs individus ont cru bon de venir chercher refuge dans ma modeste demeure. J'ai donc fait un prélèvement "odorant" afin de les identifier.
Il s’agit d’un hétéroptère de la famille des Pentatomidae : Rhaphigaster nebulosa (PODA, 1761)
Cette grande punaise (14 à 16 mm) a été déjà présentée dans la galerie : J.S. DOSSO nous montre là une photo pas banale d’une femelle qui pond ses œufs :
viewtopic.php?f=104&t=5997
La revoilà immobilisée sous la loupe :
Ventralement, on distingue le rostre étiré jusqu’aux hanches postérieures (metacoxae) et l’on voit bien la longue pointe du premier sternite abdominal (apophyse sur le cliché) qui se prolonge jusqu'aux hanches antérieures (procoxae).
C'est ce qui lui a valu son nom générique, du grec ραφιϛ, "rhaphis" en graphies latines et qui signifie "aiguille, poinçon". C'est tout à fait ça ! Francis de LAPORTE de CASTELNAU qui décrivit le genre en 1833 était sans aucun doute, comme beaucoup de naturalistes de son époque, un bon connaisseur des langues anciennes. Les études universitaires actuelles ne prennent plus en compte cette dimension littéraire.
L’insecte se nourrit de sève d'arbres à feuilles caduques. Il peut parfois également consommer des insectes morts. Les femelles pondent, en une seule génération par an, environ 40 œufs vers la fin du printemps. Le cliché de la galerie est daté du mois de mai. L'hiver, ces punaises survivent cachées dans divers abris : remises et greniers, fissures de mur, dans le lierre, sous les écorces (et prétendent même s’inviter à la maison ! ). Selon Rémy PERRIER, elles hivernent souvent dans les maisons. Cela n’a rien de bien gênant sauf lorsque ces hôtes deviennent nombreux et envahissants.
Comme chez nombre d'hétéroptères, en cas de menace (par exemple quand on cherche à l’attraper pour la faire sortir, non mais ! ) notre Rhaphigaster émet une sécrétion odorante assez désagréable et tenace.
Ce sujet a été évoqué très récemment à propos d’un autre hétéroptère :
viewtopic.php?f=134&t=21616&p=119651#p119651
J’ai donc cherché à en savoir davantage.
Latéralement, sur le métasternum s’ouvrent les ouvertures des glandes odorifiques ou glandes répugnatoires. Les orifices de ces glandes tégumentaires sont entourés d’une surface mate granuleuse ou striée qui retient la sécrétion et lui assure une plus grande diffusion quand elle se volatilise.
Voici un détail de cette surface striée :
Les odeurs émises sont très variables suivant les espèces et si certaines sont franchement infectes pour « le nez humain », d’autres évoquent la jacinthe, la pomme ou le cassis. Ainsi donc les punaises ne sentent pas toujours mauvais.
D’après une étude très documentée de Claude PAVIS, il s’agit « d’allomones », substances de défense contre les prédateurs. Chez les adultes de la famille des Pentatomidae on y trouve des hydrocarbures saturés comme de tridécane, des aldéhydes et divers esters.
Par exemple la grande punaise verte Palomena viridissima produit de l’hexanal. C’est un aldéhyde saturé utilisé par ailleurs dans l’industrie des parfums et que l’on trouve aussi dans certains vins (bonjour aux œnologues). La substance, issue de la pellicule du raisin, serait responsable des notes herbacées de certains crus.
En ce qui concerne notre Rhaphigaster ici présent, nous sommes loin de la fragrance du N°5 de CHANNEL ! Beurk !
Pour plus d’informations voir le travail ci-joint :
https://docplayer.fr/4687034-Les-secret ... hique.html