Bonsoir à tous,
Voici un minuscule coléoptère inféodé aux orties.
C'est un humble charançon.
Il s'agit de Nedyus quadrimaculatus (LINNAEUS, 1758)
= Genre Cidnorhinus C.G.THOMSON, 1865
Le genre valide est maintenant Nedyus SCHONHERR, 1825
Première description très succincte de LINNE dans le Systema Naturae : l’espèce placée dans le grand genre Curculio créé dans son monumental ouvrage de 1758 (n° 24, diagnose très minimaliste en effet)
Taille pour le moins modeste : 2 à 3 mm (sans le rostre)
Toute la France, très commun partout sur les orties. Printemps-été, selon A. HOFFMANN, 1986.
Toujours selon cet auteur, la larve vit dans les racines de Urtica dioica L. et U. urens L. Elle y creuse des galeries qui remontent parfois à la base des tiges. La ponte s’effectue en avril-mai. La transformation a lieu dans le sol ; l’imago apparaît en juin-juillet, il s’accouple et pond vers cette époque, donnant naissance à des larves hivernantes qui se transforment au printemps suivant.
C’est un des charançons les plus communs dans la Manche : j’ai consigné 55 observations de l’espèce entre 2001 et 2006 du nord au sud du département, le plus souvent en milieux humides et sur les orties.
On pourrait l’appeler "le charançon de l’ortie » A tel point qu’en 1763, l'illustre naturaliste SCOPOLI l’avait nommé C. urticae. De plus les anglo-saxons l’appellent « small nettle weevil » (le petit charançon de l’ortie).
Mais il y a cependant bien d’autres charançons qui fréquentent les orties. Voir ici cet excellent article de l’OPIE :
https://www7.inra.fr/opie-insectes/pdf/i158guyot.pdf
Étymologies à présent :
Il est délicat d’attribuer une étymologie à Curculio, genre créé par LINNE. Il est possible que le naturaliste se soit inspiré de la pièce de théâtre comique de PLAUTE (- 193 av. JC) « Curculio » parfois traduit comme « le Charençon » avec un « e » ou « Le Parasite »
Quoiqu’il en soit Anatole BAILLY nous donne quelques pistes. Par exemple κουρα (coura) « action de tondre, de couper, de raser, d’élaguer des arbres » et ουλιος (oulios) « funeste, malfaisant, dont la morsure est malfaisante » Plus simplement les charançons étaient considérés à l’époque de LINNE comme des insectes nuisibles.
Le Nedyus de SCHONHERR pourrait bien venir de νηδυς, νηδυος (nedys, nedyos en graphies latines) ce qui signifie « ventre ou bas-ventre ». Peut-être s’agit-il d’une subtile allusion de l’entomologiste à l’arrière du corps orné de 4 macules claires ? Cette hypothèse est assez peu vraisemblable car ces taches claires sont visibles dorsalement. La face ventrale montre des sternites abdominaux avec une vestiture assez homogène de larges écailles claires.
Cependant je ne vois aucune autre entrée possible dans le dictionnaire d’Anatole BAILLY.
Pour une éventuelle racine latine, dans l’ouvrage de Félix GAFFIOT, je n’ai pas trouvé trace d’un quelconque « nedyus ».
J'en appelle donc aux latinistes du Forum qui saurons bien répondre.
Quant au Cidnorhinus de THOMSON, c’est très clair pour rhinus avec ρις, ρινος (rhis, rhinos) « le nez de l’Homme » et κιδνος (cidnos) qui signifie « peu apparent » selon Rémy PERRIER. En effet, lorsque l’insecte est inquiété par l’entomologiste ou le prédateur( question : un entomologiste est-il un prédateur ? ), l'animal replie son rostre ventralement dans un profond canal pectoral. Il est alors peu visible.
Curieusement, je n’ai pas retrouvé cette entrée dans l’imposant dictionnaire d’Anatole BAILLY.