Bonjour à tous !
A force de regarder des diatomées bouger dans les oculaires, j’ai emmagasiné un certain nombre de questions et de réflexions que je vous livre ici sans trop de mise en forme. N’y voyez que l’expression de l’étendue de mon ignorance et n’hésitez pas à me corriger.
Une Diatomée, c’est tout d’abord un squelette de verre en forme de boite munie d’un couvercle recouvrant, l’ensemble étant percé d’une myriade de lumières : l’organisation géométrique de ces orifices étant en grande partie à l’origine de la beauté qui nous fascine tant.
Dans cette boite il y a une cellule munie de deux types de moteur : des chloroplastes qui transforment la lumière en sucres, ainsi qu’un moteur à oxygène, second type de centrale énergétique qui transforme l’oxygène en énergie métabolique (ATP), une mitochondrie, ainsi qu’un certains nombres d’organites divers.
Quelle est dans cette organisation, la partie de la diatomée qui fabrique le mucus ? Mystère !
Une Diatomée qui rampe sur la petite valve, ramperait-elle sur la grande si on la retournait ? Et vice-versa…
Le mucus qui les propulse ne sort que sur la valve inférieure, sinon il formerait un amas collant sur le dessus qui se verrait en agglomérant des cochonneries au passage, ce qui n’est pas le cas, puisque lorsqu’il y a fabrication d’un amas muqueux sous forme de gaine, il est visible au microscope
Qu’est-ce qui fabrique le mucus ?
Pourquoi ne sort il pas aussi par le toit ?
Comment change-t-elle de direction, partant en marche arrière instantanément ?
Trous verticaux = mouvement vertical, trous inclinés = déplacement dans le sens opposé à l’inclinaison. Propulsion = poussée par l’arrière. Il y a donc un choix binaire dans l’expulsion du mucus.
Les frustules sont généralement symétriques. Il est donc légitime de supposer les l’inclinaison éventuelles des lumières d’expulsion du mucus le sont aussi. Ces changement de direction instantanés pourrait être le résultat d’une mise en pression de l’extrémité opposée, ce qui supposerait un système d’expulsion par quart : deux inférieurs, deux supérieurs…
Pourquoi les Fragillaria en ruban, ou les Cymbella en tube, rampent quand elles sont devenues solitaires ? Le mucus entre les individus pourrait faciliter la souplesse des algues en ruban, ou en tube. Une organisation coloniale composée d’individus pouvant parfaitement devenir totalement autonomes.
A ce sujet les Cymbella Encyonema figurés ici par Michel sont très parlantes : on voit sur l’image du lien des individus en cours de division et deux d’entre eux sont en train d’étirer le tube pour se mettre en file, tête bêche, comme on les rencontre habituellement.
Qu’un mollusque rampe sur la peau du monde pour en brouter le film organique, c’est tout à fait cohérent. Mais les Diatomées rampent dans quel but ? Pas celui de brouter le dit film organique, puisqu’elles sont le film organique !
Pourquoi cet excès d’énergie qui les fait bouger constamment ? Un mécanisme qui leur permet d’optimiser leur besoin de lumière les préservant d’un recouvrement pénalisant ?
Arghhh…, le mystère de ces algues si mobiles…, si élaborées, si complexes dans leur simplicité… Car il s’agit bien de simplicité dans ces adaptations qui traversent les millions d’années. Elles ont trouvé des solutions il y a très longtemps, depuis la fin du permien si j’en crois les phylogénistes cités par Wikipedia. Les diatomées centrales sont apparues il y a 150 Ma (limite Jurassique/Crétacé), les pennales il y a 70 Ma (limite Crétacé/Tertiaire) et les pennales avec raphé 20 Ma plus tard (Crise Ilerdienne).Elles sont devenues depuis les principales constituantes du plancton marin et d'eau douce.
Francis Hallé me dit qu’il faut penser le monde comme une plante pour comprendre les plantes. Mais penser comme une diatomée… est un peu au-delà de mes possibilités car j’en sais trop peu…
Il ne me reste plus qu’à continuer d’accumuler des observations, les yeux rivés aux oculaires… et à lancer cette bouée pour bénéficier des vôtres !